Interview PRIOR

Interview du Professeur Yann Péréon, neurologue au centre de référence
des maladies neuromusculaires AOC
du CHU de Nantes

Le centre de référence des maladies neuromusculaires – Atlantique Occitanie Caraïbe (AOC) du CHU de Nantes a été labellisé en 2006. Il est rattaché au centre coordinateur du CHU de Bordeaux.

Le Professeur Yann Péréon, neurologue au CHU de Nantes, nous le présente …

 “Pouvoir améliorer le diagnostic et les traitements sont les deux axes qui vont beaucoup évoluer dans les prochaines années

PRIOR – Pouvez-vous expliquer simplement ce qu’est un centre de référence ?

Pr. Yann Péréon – Les centres de référence sont des structures hospitalo-universitaires dédiées à la prise en charge des patients atteints de maladie rare, dans différents champs respectifs en fonction des spécialités.
Ces centres ont été labellisés par le Ministère de la Santé il y a une quinzaine d’années environ.

Pour le dire simplement, il s’agit d’un service hospitalier de surexpertise dans un domaine particulier, en l’occurrence les maladies neuromusculaires pour ce qui nous concerne, qui prend en charge les patients et développe des activités de recherche. Ce sont des experts réunis dans un domaine pointu. C’est une appellation contrôlée, il y a donc une labellisation officielle.

Comment est organisé le centre de référence des maladies neuromusculaires du CHU de Nantes ?

Le centre est mixte enfant/adulte. Pour les adultes, l’accueil est réalisé aux Explorations Fonctionnelles, alors que la prise en charge des enfants se fait dans le service de Pédiatrie. Dans les deux cas, le centre organise des consultations multidisciplinaires ainsi que des consultations spécialisées.

Au cours de ces consultations, les patients viennent une ½ journée sur le site, le mardi matin entre 8h30 et 13h30. En fonction des besoins, ils peuvent ainsi bénéficier d’une consultation auprès d’un neurologue ou neuropédiatre, d’un médecin rééducateur fonctionnel, d’un pneumo-pédiatre ou d’un pneumologue, d’un cardiologue ou cardio-pédiatre, d’un psychologue, ou d’un kinésithérapeute. Plusieurs examens sont alors proposés selon les besoins : prise de sang, échographie cardiaque, explorations fonctionnelles respiratoires…

Ce mode organisationnel permet une véritable unité de temps, de lieu et d’action puisque tout se passe au même endroit. La neurologie, la cardiologie et la pneumologie sont les 3 domaines les plus concernés par les patients neuromusculaires, et ils sont dans le même couloir ! Cela laisse une véritable souplesse dans l’organisation. C’est assez rare en France.

Combien de pathologies sont concernées ?

Entre 500 et 700 maladies neuromusculaires sont actuellement identifiées. La filière de santé maladies rares concernée est la filière FILNEMUS, il s’agit de l’une des plus importantes en terme de nombre de maladies et de patients.

Pouvez-vous nous citer les 3 maladies les plus emblématiques concernées par votre centre ?

Je citerais tout d’abord deux maladies du muscle : la dystrophie musculaire de Duchenne, qui est probablement la plus emblématique chez l’enfant, et la dystrophie de Steinert, qui est la plus fréquente. La 3e est l’amyotrophie spinale (maladie du motoneurone), qui est la maladie pour laquelle il y a dorénavant de la thérapie génique.

J’aimerais aussi ajouter 2 autres maladies : la myasthénie (affection de la jonction neuromusculaire) qui est assez fréquente, et les neuropathies de Charcot-Marie-Tooth (maladies génétiques du nerf périphérique).

Ces 5 maladies sont assez représentatives et emblématiques dans notre domaine.

Quelle est la valeur ajoutée du centre de référence dans la prise en charge du patient ?

C’est principalement la surexpertise proposée ! Le travail proposé par les centres a permis d’améliorer le diagnostic des maladies les plus rares.

De plus, les consultations multidisciplinaires proposées par le centre simplifient fortement la prise en charge. Sans cela, le patient devrait organiser seul les consultations, trouver les bons spécialistes …

Enfin, lorsque cela se présente, les patients suivis par le centre peuvent avoir la possibilité de participer à un essai thérapeutique, comme par exemple, pour la myopathie de Duchenne, souvent présentée lors du Téléthon, organisé par l’AFM-Téléthon.

Combien de patients sont suivis au centre au moins une fois par an ?

Je dirais que près d’un millier de patients sont suivis au moins 1 fois par an. Il y a au total un grand nombre de patients de par le nombre de pathologies différentes. Cela justifie qu’il y ait plusieurs centres experts répartis sur la France.

Ces centres échangent très régulièrement entre eux pour des informations, des discussions de dossiers difficiles, des protocoles… C’est un fonctionnement très interactif au bénéfice des patients.

Dans un monde idéal, quelle est votre vision pour l’avenir du centre ?

L’enjeu à venir est véritablement de pouvoir améliorer la capacité d’offres aux patients : proposer plus de consultations et plus de médicaments. Ceux-ci sont assez limités dans le champ neuromusculaire. Heureusement, beaucoup de choses évoluent actuellement, et dans les 10 années à venir, de nouveaux médicaments vont arriver.

Il s’agira aussi d’améliorer le diagnostic génétique de toutes ces maladies. Le champ des maladies neuromusculaires est très vaste, avec presque 700 maladies identifiées, et elles ne le sont pas encore toutes et de nombreux patients sont encore en errance diagnostique.

Pouvoir améliorer le diagnostic et les traitements sont les deux axes qui vont beaucoup évoluer dans les prochaines années.

Comment vous contacter ?

Le patient est généralement adressé par un médecin généraliste, neurologue ou pédiatre, qui suspecte une maladie neuromusculaire. Il arrive parfois également que certains patients contactent directement le centre, sur conseil d’un confrère en cas de déménagement par exemple.

Avez-vous autre chose à ajouter ?

J’aimerais terminer par évoquer le lancement du nouvel essai de thérapie génique pour la myopathie de Duchenne. En janvier 2022, débute en effet un essai clinique industriel international, auquel deux centres investigateurs en France participent, dont le centre de référence maladies neuromusculaires du CHU de Nantes qui en est le coordinateur national.

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